
Je suis né à Verona (Italie) en 1941. J’ai grandi dans le collège don Nicola Mazza, berceau de St Daniele Comboni et de son œuvre destinée à l’Afrique Centrale. Dans ce collège venaient régulièrement les Pères Jésuites Carlo Marcucci, décédé en Italie au retour de Koumra à 50 ans en 1971, et Luigi Lomazzi, qui a œuvré dans le diocèse de Sarh depuis 1959 et qui est décédé à 91 ans en septembre 2014. Sans qu’ils me parlent de vocation, ce sont eux qui m’ont attiré à la Compagnie.
Je suis arrivé au Tchad en octobre1965 après le noviciat et la philosophie, pour le diocèse de Sarh. J’y suis resté jusqu’en 1985. J’ai fait ma théologie à Lyon-Fourvière en 1968-72. A Lyon j’ai été ordonné en 1971 par Mgr Henri Véniat. J’ai fait mon 3°An à Torino en 1975-76. Au Tchad j’ai travaillé le plus longtemps dans la paroisse rurale de Bédiondo, mais aussi pendant 5 années à la Procure du Diocèse de Sarh. Par la suite, j’ai été au Cameroun : P. Socius au Noviciat de Bafoussam pendant 5 années, puis encore 3 comme ministre à Yaoundé-SFX. En 1993 j’ai été affecté au Bénin pour la paroisse rurale de Sèhouè, que nous avons gardée jusqu’en 2001. De là, la communauté s’est déplacée à Godomey, à la périphérie de Cotonou. Les 4 dernières années de mon séjour africain je les ai passées dans la nouvelle résidence St Ignace d’Agoé-Nyivé près de Lomé.
Les problèmes de santé se faisant plus pressants, en octobre 2008 j’ai fait retour en Italie.
Oui, j’ai eu à m’occuper de traductions bibliques. C’était dans le cadre de mon travail paroissial.
A Bédiondo nous étions pressés de préparer, de dimanche en dimanche, les Messes que venait de proposer la reforme du Concile. Ainsi sont nés les missels des années A, B et C en vigueur encore maintenant. Ce travail a pu se faire seulement par la collaboration de plusieurs personnes. Pour y arriver il a fallu partir de loin, car la langue bédiondo n’avait encore aucune base linguistique établie. Ainsi, en même temps que les traductions bibliques, mettions-nous en place un alphabet reconnu, quelques éléments de grammaire, un lexique (qui a été par la suite publié par le P. Fédry, avec noms scientifiques de plantes et d’animaux par le P. Palayer), un recueil de 800 proverbes, des contes, des chants etc. Les traductions alors réalisées sont à reprendre entièrement.
J’aurais aimé pouvoir rester plus longtemps dans cette paroisse, mais en 1978 elle à été cédée aux Pères Comboniens.
Une nouvelle fois j’ai eu à travailler à la traduction de textes bibliques. C’était en langue fon, une fois arrivé à Sèhouè, au Bénin, en 1993. La langue fon avait été déjà bien analysée. Les missels des dimanches étaient déjà établis. Mais pour les messes de semaine célébrées en langue, je me suis aperçu que les lecteurs des premières lectures avaient du mal à improviser une traduction en fon à partir du texte en français qu’ils avaient entre les mains. Voilà donc une aide utile qui pouvait être offerte pour une meilleure proclamation des textes qui précèdent les évangiles. Je me suis proposé pour mettre en place encore une équipe et cela, bien sûr, si les prêtres du doyenné rural et l’Archevêque Mgr I. de Souza approuvaient le projet. La traduction a été réalisée par un prêtre très compétent, originaire d’Abomey. Il restait la saisie, les corrections, l’impression, la mise en vente. Ainsi sont nés les 3 volumes des Premières Lectures en Fon des Messes de semaine.
Là encore, en parallèle et encouragé par l’Abbé M. Dujarier, j’ai aidé M. P. Boco dans la publication des Proverbes Fon qu’il recueillait et savait bien présenter. Au total 2.011 proverbes en 5 fascicules qui sont en vente à Cotonou.
Faire un bilan de ma vie de 43 années données à l’Afrique au milieu de tant de situations et lieux divers serait long. Je reviens sur trois aspects différents.
A mon arrivée au Tchad j’avais à peine 24 ans. Comment m’y prendre? Je remercie les confrères aînés: ils m’ont conseillé d’avoir avant tout une attitude humble, de respect, d’écoute; d’effort pour ne pas juger, afin d’entrer dans les mentalités et les habitudes, en passant aussi par la route incontournable de la langue parlée. Sur plusieurs d’entre nous, les cours et la fréquentation du P. J. Goetz ont eu un rôle important (nous gardons la tombe du Père ici, à Gallarate, car il est décédé dans une localité proche, alors qu’il animait une session avec des laïcs). Je n’ai pas de titres universitaires en linguistique, anthropologie ou autres, car j’ai voulu rester essentiellement dans le travail sacerdotal et d’évangélisation. Mais je m’intéresse et j’admire ce qui se fait pour que reste et ne soit pas perdu ce qui est valeur vécue dans les diverses cultures, au delà d’une uniformité qui offre ses avantages.
Vers la fin de mon séjour au Tchad l’extension du conflit dans le pays et la famine m’ont été très pénibles à vivre. C’était dans les années 80. J’ai eu l’impression qu’à partir de ce moment les conflits, les épidémies et tant de pauvretés se sont comme multipliés, en Afrique surtout, mais malheureusement aussi dans le monde entier. En face de tant de violences je me sens impuissant, incapable de comprendre. Je fuis les informations et les images qu’on nous propose chaque jour. Je voudrais ne pas voir, ne pas entendre. En Italie nous ne sommes pas à l’abri des situations et souffrances révoltantes. Je porte tout cela dans la prière, avec le désir d’une vie sobre et simple. Et j’espère.
Passer du Tchad au Cameroun, puis au Bénin, puis au Togo, cela m’a permis de me trouver face à des réalités toujours nouvelles. Je n’avais pas circulé en Afrique et je ne l’ai pas fait par la suite non plus, restant dans ma région. Mais dès lors il m’a été donné de collaborer avec des confrères et des prêtres africains, d’être appelé à apporter une aide à la PAO naissante, qui se frayait un chemin au milieu de diocèses et congrégations déjà bien établies et solides. J’ai participé à la formation de plusieurs de nos jeunes compagnons (et moins jeunes déjà), venant d’horizons divers. Certains sûrement n’ont pas gardé de moi seulement de bons souvenirs. Qu’ils veuillent m’en pardonner.
Qui entre et progresse dans la Compagnie est appelé à le faire uniquement par l’amour de Seigneur Jésus. Mais tristement nous y mêlons aussi des motivations humaines, dont nous devons nous purifier chaque jour, dans la prière et l’accueil de la grâce.
La maison de Gallarate, au nord de Milan, est un centre d’accueil pour les confrères venant d’Afrique. Ce n’est ni Rome, ni Paris. Quand je parcours le catalogue PAO, les confrères qui me sont inconnus deviennent d’année en année plus nombreux: bien sûr, je ne peux que m’en réjouir.
A chacun des compagnons, italiens ou d’ailleurs, je me permets de dire de ne pas perdre la saveur de ses propres origines.
Que le Seigneur nous garde sereins et courageux dans son service.
Gallarate, le 22 janvier 2015
Pio ADAMI, sj.
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