in NPAO n° 209 du 16/01/2007 Numéro Spécial Congrégation Provinciale
Groupe de travail sur l’UCAC
Membres du groupe : P. J. Fedry, P. M. Birba, P. J. R. Ndombi, P. L. Lado, P. E. Goussikindey, P. P. Bere, S. J. Zamcho, S. T. Mbatna (secrétaire).
Dans sa présentation de l’œuvre, le P. J. Fédry a posé une question fondamentale. Faut-il partir de l’UCAC ou pas ?
Avant d’entrer dans le vif du sujet, nous avons profité de la présence de John ZAMCHO pour situer l’IST dans le cadre de l’UCAC. Il en ressort que : l’IST est administré par le groupe ICAM. Depuis sa fondation il y a près d’un siècle en France, le groupe ICAM collabore étroitement avec les jésuites. En s’installant au Cameroun, le groupe ICAM a sollicité l’aide de la PAO. Nous fournissons ainsi à l’IST au moins un directeur des études et un aumônier chargé de la formation humaine. John et Aurélien y œuvrent en ce moment. Ce groupe a conscience de l’importance de la Compagnie et a confiance en elle. Il faut signaler que pour l’instant il n’y a aucune convention entre l’IST et la PAO. L’IST, tout en restant autonome, entretient des liens avec l’UCAC. Ces liens seront bien définis dans le prochain statut de l’UCAC.
N’étant pas inquiété de notre relation avec l’IST, nous sommes revenus sur l’épineuse question de l’UCAC avec une autre interrogation : peut-on renégocier l’accord entre l’UCAC et la PAO ? Pour répondre à cette question il nous a semblé bon de rappeler les antécédents :
– La Faculté de Sciences Sociales et de Gestion est en expansion avec le système LMD. Mais nous n’avons pas les moyens d’entreprendre des choses en vue de l’amélioration des capacités de nos étudiants. Il est difficile de créer de nouvelles disciplines et de nouvelles filières. Tout simplement parce que nous ne contrôlons pas les finances.
– La Congrégation pour l’Education a fait remarquer que la Compagnie s’est donné la liberté d’étendre la faculté sans son avis. Selon la Congrégation la convention mentionne les sciences sociales mais pas la gestion. Or nous ne nous étions pas entendus sur les disciplines à enseigner dans les sciences sociales.
– Nous avons demandé d’exercer nos enseignements selon les directives de « Ex corde Ecclesiae » Nous ne l’avons obtenu que pour le campus d’Ekounou tous les enseignements de Nkolbisson restent donnés selon les directives de « Sapientia christiana »
– Le P. Provincial a préparé des réformes qu’il devait présenter aux conférences épiscopales de l’Afrique centrale à Malabo. Ils ne lui ont pas permis de s’exprimer
– L’instance qui doit diriger l’UCAC, c’est-à-dire un représentant de chacune des six conférences épiscopales de la sous région, est mise à l’écart. Les décisions sont prises par le Grand Chancelier et le Recteur (l’ancien).
– Ils ont demandé le départ du P. Philippe Dubin et actuellement il est accepté parce qu’il recherche des fonds pour agrandir les structures.
– A présent il y a une paix virtuelle et peut être éphémère avec l’arrivé du nouveau Recteur. Mais on ne peut pas soumettre les institutions aux humeurs des individus. Il faut décider en tenant compte de l’avenir.
Nous demandons donc au P. Provincial de revoir la convention.
Actuellement notre responsabilité n’est plus pleinement engagée. Il nous faut pour cette démarche un bon canoniste. Ecrire au Chancelier, au Recteur et à toutes les instances qui administrent l’université.
Nous devons faire une liste de tout ce dont nous avons besoin pour que cela figure dans la nouvelle convention que nous proposerons : l’autonomie financière, les deux vices doyens et tous les autres besoins.
Nous connaissons aussi une difficulté avec notre propre hiérarchie qui n’informe pas assez la Congrégation pour l’Education de ce que nous vivons sur le terrain.
Les enjeux de cette nouvelle convention nous aideront à décider de notre départ de l’UCAC ou pas.
Nous demandons aussi aux jésuites initiateurs des œuvres qu’ils montrent les bailleurs de fonds aux africains.
Il est souhaitable que les candidats pour assurer la relève à l’UCAC soient plus nombreux.
in NPAO n° 207 du 30/09/2006
PRESENCE JESUITE A L’U.C.A.C. : LE POINT
La décision des évêques
“Décidée en 1989, écrit Denis Maugenest, et effectivement ouverte en 1991, l’Université Catholique d’Afrique Centrale est le cinquième établissement[1] d’enseignement supérieur catholique en Afrique aujourd’hui [1992].
Cette université est d’abord la création commune des 41[2] diocèses du Cameroun, de Centrafrique, du Congo, du Gabon, de la Guinée équatoriale et du Tchad. C’est à Bangui, le 8 juillet 1989, que la seconde assemblée plénière de l’Association des Conférences Episcopales de la Région d’Afrique Centrale (ACERAC) a pris cette décision de fonder sa première oeuvre commune : une université pour les besoins des 6 millions de catholiques de la région, des 20 millions d’habitants entre Nigeria et Zaïre et, plus largement, de tous ceux qui voudraient la fréquenter en ce lieu relativement central de la côte atlantique du continent : Yaoundé, capitale du Cameroun.
Le Saint Siège fut un ardent promoteur de ce projet. Le Pape Jean-Paul II s’en entretint lui-même dès 1985 avec le président du Cameroun, SE M. Paul Biya, et il ne cessa de lui apporter son soutien actif et celui des Congrégations romaines concernées, celles pour l’Evangélisation des Peuples et pour l’Education Catholique en particulier.
La Compagnie de Jésus, très tôt pressentie par le Cardinal Christian Tumi, alors président de la Conférence épiscopale du Cameroun et promoteur du projet, pour apporter sa contribution pédagogique à l’Université, acceptait de prendre en charge l’organisation, la direction et l’animation d’une Faculté de Sciences sociales et de Gestion – et éventuellement d’autres activités pouvant naître à partir de ce premier ensemble de formations. C’est l’ensemble des provinces de l’Assistance d’Afrique qui furent alors invitées à soutenir cette oeuvre nouvelle en y envoyant les hommes nécessaires”.[3]
La participation des jésuites
La Compagnie de Jésus, représentée par Edouard de Loisy, provincial de la PAO, a signé une convention avec l’UCAC, représenté par l’Abbé Barthélemy Nyom, recteur, le 30 septembre 1991 :
“l’ICY propose à la Compagnie de Jésus, qui accepte, de prendre la responsabilité, de diriger et d’animer la Faculté des Sciences sociales conformément aux Statuts ; la Compagnie de Jésus s’engage à mettre à la disposition du corps enseignant permanent de la faculté quatre de ses membres, prêtres, qui auront les qualités sacerdotales et humaines ainsi que les compétences universitaires requises pour assurer valablement ces fonctions. Le doyen sera choisi parmi ces quatre enseignants. La Compagnie veillera à ce que ce corps enseignant soit ouvert à d’autres religieux ou religieuses, prêtres diocésains et laïcs, dans toute la mesure du possible” (Extrait des articles 1, 2, 3, 4).
La première équipe de jésuites s’installe en 1991 à la Communauté Bellarmin, et comprend les enseignants suivants : Denis Maugenest, vice-recteur, B. Chandon-Moët, doyen, Henri De Decker, vice-doyen, Philippe Dubin (responsable Ecole de gestion), Joseph Boute (démographie et responsable de la bibliothèque). Le frère Antonio Mason est ministre et économe de la communauté. Les cours commencent en octobre 1991 à Nkolbisson avec une classe de 40 étudiants en sciences sociales, 40 en gestion ; et 40 en Faculté de théologie. A cette équipe fondatrice viendront se joindre successivement en 1994 le père Michel Halbecq (juriste, assassiné plus tard à Brazzaville, en 1998) et le scolastique Jean-Marie Makang (doctorant, qui quittera la Compagnie par la suite), en octobre 1994 Claude Pairault, premier doyen de la Faculté de philosophie et Joseph Atanga (qui deviendra évêque de Bafoussam), en octobre 1996 Jacques Fédry, en octobre 1998 Louis de Vaucelles, second doyen jusqu’en 2004, en octobre 2002 Marti Birba, enseignant, et devenu vice-doyen en octobre 2005. Jacques Fédry, normalement atteint par l’âge de la retraite en octobre 2004, a été nommé par deux fois, avec dispense d’âge, comme doyen intérimaire “ad annum”.
Le campus d’Ekounou, pour les formations de gestion et abritant aussi l’Association pour la Promotion des Droits de l’Homme en Afrique Centrale (APDHAC) ainsi que les Presses de l’UCAC (lancées par Claude Pairault), s’ouvre en octobre 1996, sous la direction du vice-doyen Philippe Dubin : les différentes filières s’y créent et s’y développent rapidement (Economie de gestion, Comptabilité-finance, Commerce et Distribution). Une partie des étudiants du “tronc commun” des deux premières années de Nkolbisson entre à Ekounou pour la Licence d’Economie de gestion. Le campus d’Ekounou comprend les deux tiers des effectifs de la Faculté, beaucoup d’étudiants étant attirés par la bonne image vite acquise des produits de la Catho” par les entreprises.
Les étudiants jésuites formés à l’UCAC depuis sa création, appartenant à la PAO, à la PAC, à la région indépendante Rwanda-Burundi ou à Madagascar, sont au nombre de 31 (dont une quinzaine ont eu la Maîtrise) en Faculté de Sciences sociales et de 12 en Faculté de philosophie.
La Compagnie de Jésus a participé à la création de l’Institut Supérieur de Technologie, animé par l’ICAM, et à la formation, avec J.P. Berger à Douala, pour le second cycle.
La Faculté aujourd’hui : une institution appréciée
Aujourd’hui, la Faculté de Sciences Sociales et de Gestion (FSSG) entre dans sa quinzième année : le nombre d’étudiants est actuellement de 1 140, les filles légèrement moins nombreuses que les garçons, répartis sur deux campus : 325 à Nkolbisson, 815 à Ekounou (ce dernier chiffre incluant les 45 étudiants en Master Droits de l’Homme). Les non Camerounais représentent environ 8% de l’effectif total. Le nombre des enseignants s’élève à 215 environ : 37 permanents (17 à Nkolbisson, 21 à Ekounou, assistants compris) et 158 associés, auxquels il faut ajouter une quinzaine d’enseignants du Master des Droits de l’Homme et encore une dizaine d’enseignants visiteurs.
Sa réussite est repérable aux signes suivants : nombre croissant de demandes d’entrée (600 candidats au concours d’entrée en 1996, autour de 2000 en 2006), demande de partenariat de plusieurs entreprises avec la Faculté pour embaucher nos meilleurs étudiants, développement de la recherche dans un réseau international, nombreuses publications, organisation de colloques internationaux, appartenance au réseau d’excellence RAMEGE, pôle d’excellence régional pour les droits de l’homme, relations fécondes d’échanges avec des universités de l’extérieur (Lille, Bordeaux, Marseille, Brest, Pretoria, etc.) ou des instituts de formation africains (Dakar, Abidjan). Après une période difficile, grâce à l’aide d’un organisme bienfaiteur, l’équipement informatique (avec lien Internet haut débit) est satisfaisant (2 laboratoires de 20 postes sur chacun des campus). Le suivi des étudiants est assez bon, et les associations attestent d’une certaine vitalité, en sport notamment. La mise en place du système LMD est en train de s’effectuer progressivement (3 Masters à Nkolbisson, 6 à Ekounou ; un doctorat en voie de se mettre en place en Sciences sociales, Option Droit de l’Homme et action Humanitaire).
Les difficultés et points de vigilance : diminution des effectifs non camerounais, pénurie de locaux, formation des enseignants pour passer à la pédagogie du LMD.
Les projets en cours portent sur la construction de nouveaux bâtiments (le père Dubin a commencé un travail à ce sujet, par mission reçue du recteur, pour plan d’ensemble des formations et des locaux nécessaires, et calcul des coûts en vue d’obtenir un financement auprès de bailleurs de fonds), l’achèvement de la réforme LMD (comprenant l’ouverture de doctorats), l’ouverture d’une filière nouvelle « Informatique pour la gestion » à Ekounou, le partenariat avec de nouvelles universités étrangères (Brown University aux USA), l’association des laïcs à des postes de responsabilité, la création de cours préparatoires ou cours de premier cycle dans les pays de la sous-région, dont les étudiants viendraient au 2ème cycle pour le Master.
Le discernement de la Compagnie
Plusieurs se sont demandés, devant les difficultés accumulées, s’il n’était pas temps de nous retirer de l’UCAC. Les raisons militant pour le départ étant de plusieurs sortes : le fait que nous n’arrivons plus à fournir les effectifs de 4 permanents jésuites, que la Compagnie universelle n’a pu nous secourir en envoyant quelques personnes qualifiées, que les jeunes de la Province souhaitent que nous ayons nos oeuvres propres pouvant être dirigées librement selon notre charisme propre.
Le Provincial, après avoir parlé avec plusieurs enseignants, a réuni une mini-consulte en début de février 2006 à Douala. En pesant le pour et le contre, il a été décidé alors de garder le statu quo : se donner une année pour voir plus clair. La décision d’un retrait immédiat est apparue comme nuisible aux étudiants comme aux enseignants. L’Assemblée de province début janvier 2007 étant donnée comme une date butoir pour la décision à prendre.
Lors de sa visite à Yaoundé en avril 2006, le Provincial a réuni les deux jésuites permanents (Birba et Fédry) et les deux associés (Forbi et de Rosny) pour faire le point. La Congrégation pour l’Education catholique à Rome avait, sur proposition de l’ancien recteur, demandé de scinder la Faculté en deux (sciences sociales d’un côté, gestion de l’autre, sous deux Constitutions apostoliques distinctes); puis, après avoir découvert que la Faculté n’avait pas été consultée sur cette scission, et n’en voyait pas la nécessité, s’est ravisée en faisant savoir que la chose était remise à plus tard… d’où le soulagement de la Faculté. Le climat de sérénité qui s’est créé dans la collaboration avec le nouveau recteur permet d’espérer un avenir meilleur. Nous nous donnons un délai pour essayer d’obtenir un renfort de la Compagnie africaine et mondiale, avec la recommandation du Père Général, pour le temps de soudure délicat que nous traversons (des jeunes de la province se préparent mais ils ne pourront être là avant deux ou trois ans, voire quatre ou cinq). La venue d’un spiritain, docteur, dans l’équipe animatrice est un signe d’espérance, en développant une possibilité prévue par la Convention.
Les raisons qui ont amené la Compagnie de Jésus a s’engager dans la création de l’UCAC et à prendre la direction de la Faculté de Sciences sociales et de gestion il y a quinze ans sont toujours valables aujourd’hui : la formation de futurs cadres africains honnêtes et compétents au service de leur pays. Le besoin est toujours là, d’une importance plus cruciale que jamais. En quinze ans, une dizaine de jésuites permanents (dont trois sont décédés) et cinq ou six associés ont peiné pour faire de cette Faculté une institution appréciée : pour la Compagnie, c’est un lieu apostolique privilégié de rencontre et de formation des jeunes et des éducateurs africains, pour lequel nous sommes bien préparés par la tradition pédagogique et spirituelle qui nous est propre. C’est bien pour cette raison que le Projet apostolique de la PAO (1999-2008) a retenu le travail à l’UCAC parmi ses priorités (l’UCAC est mentionnée en première position, à la page 62, en conclusion des orientations pour l’action, pour les compétences à former).
Nous préparons donc la rentrée prochaine, en attendant les décisions de Rome et du Conseil supérieur d’un côté, l’aide espérée de la Compagnie de l’autre côté.
Jacques Fédry, 26 avril 2006
[1] Après Kinshasa (1975), Abidjan (1975), Nairobi (1981), Port-Harcourt (1981), institutions toutes orientées essentiellement vers les sciences ecclésiastiques.
[2] En 2006, l’ACERAC compte 55 diocèses ou préfectures apostoliques.
[3] Institut catholique de Yaoundé, Inauguration officielle, 6 et 7 décembre 1991, Yaoundé, Ama 1992, p. 5-6.